Guillaume FARDE
- Professeur affilié à l’École d’affaires publiques de Sciences Po
- Conseiller scientifique de la spécialité sécurité-défense
- Chercheur associé au CEVIPOF
1 – En tant qu’expert en sécurité intérieure et en politiques publiques, quelle est votre vision de l’évolution du secteur de la sécurité électronique en France ?
C’est un secteur tiré par un contexte sociétal où la demande de sécurité est forte. Par conséquent, les administrations mais aussi les entreprises et les particuliers renforcent la sécurité des bâtiments qu’ils fréquentent (immeubles tertiaires, sites industriels, logements…) pour pallier l’augmentation des atteintes aux biens et notamment les cambriolages, pour lesquels les taux d’élucidation par les services d’enquête demeurent très bas (7% en moyenne sur l’ensemble du pays sur les 5 dernières années).
Sur le plan de l’offre, la complexification des systèmes conduit cependant à une évolution des modèles de vente. La seule installation du système sans services associés (maintenance, aide à l’utilisation voire intervention physique) n’est plus vraiment possible aujourd’hui. Cela conduit les acteurs de la sécurité électronique à devoir proposer des offres globales soit en nouant des partenariats commerciaux avec d’autres acteurs de la filière soit en acquérant des sociétés d’hypervision et/ou de surveillance humaine. Cette seconde option a d’ailleurs été privilégiée avec succès par le groupe ITQ.
2 – La souveraineté nationale, menaces ou opportunités pour les entreprises françaises de sécurité électronique ?
Le pire ennemi du patriotisme économique reste la guerre des prix. En la matière, on peut regretter que l’Administration ne donne pas toujours l’exemple en acquérant des solutions chinoises à moindre coût. Le législateur étant frileux quant à l’instauration de logiques de préférence nationale sur les appels d’offres publics, il reste la pédagogie et la sensibilisation.
Pour une organisation quelle qu’elle soit, recourir à des systèmes chinois c’est prendre un risque d’ingérence considérable. Il faut le dire et il faut le faire savoir au marché.
3 – En matière d’utilisation des nouvelles technologies appliquées à la sécurité privée quel héritage des JOP devrait-on conserver et pourquoi ?
S’il ne fallait en pérenniser qu’un ce serait la vidéo intelligente. D’abord l’étude de l’opinion que j’ai eu l’honneur de conduire pour le compte du Continuum Lab’ montre que les Français y sont favorables pour les deux tiers d’entre eux et, ensuite, ces expérimentations s’inscrivent dans le sens de l’Histoire.
Refuser l’IA dans les années 2020 c’est comme refuser Internet dans les années 2000. Tôt ou tard vous êtes emporté par la vague donc autant apprendre à surfer et vite !